Drôle de question pour certains, mais débat important pour d’autres. Le sujet est d’actualité en Ontario actuellement alors que le gouvernement a dressé une liste de ligues sportives ayant le droit de poursuivre certaines activités. L’OUA, l’organisme qui régit le sport universitaire en Ontario, n’en fait pas partie et les réactions sont vives de l’autre côté de la rivière des Outaouais.

L’Ontario gère évidemment la pandémie à sa manière et en fonction de ses structures propres qui ne sont pas les mêmes qu’au Québec. Mais il est très intéressant de suivre ce qui s’y passe en comparaison avec le Québec étant donné les nombreuses similitudes entre les réalités des deux provinces.

Tout d’abord, il faut savoir que le gouvernement ontarien a promulgué en 2020 le Reopening Ontario Act qui est une loi accordant au gouvernement des droits pour gérer l’urgence et la protection civile concernant la pandémie de COVID-19. Elle dicte notamment les règles à suivre pour les organisations qui souhaitent poursuivre leurs activités. Cette loi est mise à jour régulièrement.

L’élément qui nous intéresse ici est la reconnaissance des organisations sportives qui ont obtenu une dérogation pour poursuivre leurs activités. Outre les ligues professionnelles, le document mentionnait le nom de ligues qualifiées d’amateurs élites ayant obtenu la permission du gouvernement pour continuer à jouer ou s’entraîner.

  • OHL (Ligue junior de hockey masculin de l’Ontario)
  • PWHL (Ligue junior de hockey féminin de l’Ontario)
  • Elite Baseball League of Ontario U18
  • League 1 (Ligue semi-professionnelle de soccer)
  • Junior ‘A’ Lax (Ligue de crosse junior masculine)
  • Women’s Field Lax U19 ‘A’ League ((Ligue de crosse junior féminine)
  • OSBA (Ligue de basketball de niveau secondaire)

Alors la question apparaît : où est la OUA? Il faut savoir qu’en Ontario, la OUA ne gouverne que les sports universitaires alors qu’au Québec, le RSEQ a sous son chapeau les ligues universitaires, collégiales et scolaires. De plus, l’OUA fonctionne différemment du RSEQ alors qu’elle est un organisme décisionnel. C’est-à-dire que le conseil de l’OUA, composé de deux président(e)s et de deux vice-président(e)s d’universités ainsi que de trois directeur(trice)s de départements des sports, peut prendre des décisions qui s’appliqueront à tous les membres. Au RSEQ, ce sont les membres qui en collégialité prennent les décisions.

Ceci dit, l’OUA n’a pas obtenu la dérogation permettant aux étudiants-athlètes de s’entraîner et encore moins de participer à des compétitions. Tous les intervenants là-bas se demandent ce que ça prend pour que les athlètes universitaires obtiennent le statut d’élite. À commencer par le président de l’OUA, Gord Grace. « Objectivement, c’est difficile à comprendre. Ne pas reconnaître l’OUA comme faisant partie de l’élite est un manque de respect. Nous avons des athlètes qui ont représenté le Canada aux Jeux olympiques, des joueurs qui évoluent aujourd’hui dans la LNH et même la NFL. Nos entraîneurs sont partout dans les programmes nationaux. »

Gord Grace, président de l’OUA

M. Grace ajoute : « Je n’ai rien contre les ligues qui ont obtenu l’exemption, mais je ne comprends pas que des ligues comme la OHL ou la OSBA ont le droit de jouer alors que leurs athlètes poursuivront leur cheminement dans la OUA l’an prochain. »

À cela, on pourrait toutefois rétorquer que les meilleurs de la OHL et de la OSBA – soit la très vaste majorité de ceux qui deviendront professionnels après être passés par ces ligues – ne passeront pas par l’OUA. Le sport universitaire canadien étant ainsi fait qu’il n’est pas un passage obligé dans le développement des athlètes d’élite, contrairement aux États-Unis où la plupart des membres des différentes équipes nationales ou des équipes professionnelles sont passées par la NCAA.

Questionné par Bulletin sportif à savoir s’il y a une règle à laquelle l’organisation pourrait ne pas s’être conformée, M. Grace répond qu’il n’en voit aucune. « Il n’y a eu aucun processus de sélection à proprement parler. Ce n’est pas comme si on nous avait demandé d’appliquer pour obtenir un statut, il n’y a rien eu de ce genre. C’est une décision arbitraire basée sur on-ne-sait-quoi. »

Le président poursuit : « Nous ne demandons pas à avoir le droit de jouer des matchs, simplement de pouvoir permettre aux athlètes de s’entraîner. Ce sont des athlètes de très haut niveau qui ont besoin de se maintenir en forme pour performer. Si ils peuvent accéder aux sites d’entraînement sous la supervision de leurs coachs, ils seront alors en mesure de reprendre la compétition dès que ce sera possible. »

M. Grace aimerait bien avoir des explications, mais il n’arrive pas à en obtenir. « La liste a été établie en juin dernier. Nous avons essayé de parler au gouvernement. Mais à part des bureaucrates qui ont dit qu’ils allaient étudier la question, aucun politicien ne nous a parlé. »

Que ce soit l’OUA, ses membres et même USports, les appels publics au gouvernement ontarien pour que le statut des équipes sportives universitaires soit reconnu comme élite ont été nombreux cette semaine, comme en font foi les quelques exemples ci-haut.

Pendant ce temps au Québec, les athlètes doivent attendre que le gouvernement accorde des exemptions comme à l’hiver 2021 alors que certains avaient été autorisés par la Direction des sports, des loisirs et de l’activité physique (DSLAP) du ministère de l’Éducation. Ils se préparaient pour les Jeux olympiques et paralympiques, autant ceux de Tokyo que ceux de 2022 en Chine, détenaient un brevet de Sport Canada ou étaient identifiés au niveau excellence de leur fédération sportive.

Actuellement, des démarches sont entreprises par diverses fédérations sportives québécoises pour revenir à ces conditions. Certaines directions de fédération, dont celle d’athlétisme, militent aussi pour que les athlètes ayant le statut d’élite et de relève obtiennent également le droit de reprendre l’entraînement.

Il faut savoir que chaque fédération a ses propres définitions des niveaux excellence, élite et relève.

Toutefois, tous les étudiants-athlètes universitaires n’ont pas ces statuts. Par exemple, chez Volleyball Québec, seuls les membres des équipes nationales ont le statut d’excellence alors qu’il faut faire partie des équipes du Québec pour avoir les statuts d’élite ou de relève. Un problème pour les athlètes universitaires puisque bientôt, les athlètes de 19 ans et plus n’y seront plus admissibles.

Au basketball, le statut élite est réservé aux membres des équipes nationales alors que le statut excellence est pour l’équipe du Québec U17 et relève pour les membres d’Équipe Québec U15. Les athlètes collégiaux et universitaires sont généralement entre les deux.

Cependant, au-delà des reconnaissances individuelles officielles, ce sont les ligues dont il est davantage question ici. Et en ce sens, le gouvernement du Québec, contrairement à celui de l’Ontario, n’a pas donné d’exemptions du même genre. La question du statut de sport d’élite au Québec n’est donc pas un enjeu qui touche les programmes sportifs des universités québécoises pour le moment.

Ceci dit, si vient le temps éventuellement d’établir le statut d’élite au sport universitaire québécois, il sera important de mettre dans la balance la quantité importante d’athlètes ayant représenté le Canada aux différents championnats du monde et/ou aux Jeux olympiques qui sont passés par le sport universitaire québécois au cours de leur carrière sportive.

Selon les données gracieusement transmises par Patricia Demers, directrice générale de la Fondation de l’Athlète d’excellence du Québec, 20 athlètes ayant compétitionné au sein d’une des universités du RSEQ ont participé aux Jeux olympiques depuis Londres 2012.

Source : FAEQ

À ceux-là, il faut ajouter tous les athlètes qui ont participé à diverses compétitions internationales ou qui ont poursuivi leur chemin au sein de différentes ligues professionnelles en Amérique du nord et en Europe au hockey, au football, au soccer, au basketball ou au volleyball. Et que dire de tous ceux qui ont été membres des équipes du Québec, ont participé aux programmes des équipes nationales et remporté des médailles aux divers championnats canadiens?

Doit-on ajouter que tous ces athlètes dont le mode de vie est dicté par leur passion pour le sport et leur volonté de performer au plus haut niveau sont en même temps des étudiants à temps plein? L’intensité d’entraînement auxquels ils s’astreignent, les sacrifices encourus et le niveau de performance offert sont les plus élevés chez les amateurs dans la très grande majorité des sports. Alors à la question si le sport universitaire est de niveau élite, ma réponse est un retentissant oui.

Enfin, pour ceux qui pourraient se demander si le RSEQ a entrepris des démarches pour permettre aux étudiants et élèves athlètes de reprendre l’entraînement, la réponse est on ne peut plus claire de la part de son pdg Gustave Roël : « La démarche est présente depuis 20 mois. »

Photo de couverture : Jessy Lacourse, championne canadienne universitaire de cross-country en 2021 et potentielle olympienne. Pour connaître son parcours, je vous invite à lire son portrait paru dans Bulletin sportif en 2020.

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