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Il y a quelques semaines on apprenait que le RSEQ avait pris la décision de reléguer le programme de hockey féminin des Lynx d’Édouard-Montpetit en division 2 pour la saison 2024-2025. Un dossier qui concerne les fondations mêmes du développement au hockey féminin.

Pour comprendre le choix fait par le RSEQ, il est essentiel de faire un retour en arrière pour mettre certaines choses en perspective. Hockey Québec a déterminé que la division 1 collégiale était la ligue d’excellence pour les filles de cet âge. Puis, il y a quatre ans, un comité avait conclu que cette division devrait être composée de six équipes pour assurer un développement optimal de l’élite.

Après avoir étudié les cas de chacun des programmes, il avait été décidé que celui de Dawson allait être relégué en D2. Cependant, le cégep a porté la décision en appel et a gagné son recours. Ensuite, on se souvient du cas des Patriotes de cégep St-Laurent dont la direction avait annoncé la fin des activités, il y a environ 18 mois. Après une mobilisation importante du milieu, cette décision avait été renversée et les Patriotes ont ainsi pu remettre une équipe sur la glace.

Se retrouvant encore à sept équipes en D1 au printemps dernier, le RSEQ a demandé à chaque programme de se présenter devant un comité d’évaluation. Ce dernier a par la suite convoqué les programmes de St-Laurent et d’Édouard-Montpetit pour déterminer lequel des deux serait relégué en D2. Le choix s’est fait en se basant notamment sur le ratio de victoires/défaites des dernières années. Les deux équipes ayant remporté moins de 25% de leurs matchs.

Tamara Gérin-Lajoie / Crédit photo : MPhotographie

Après délibération, en évaluant non seulement les résultats sur la patinoire, mais également les installations, l’encadrement pédagogique et sportif ainsi que le bassin de recrutement, le comité a annoncé que les Lynx d’Édouard-Montpetit évolueraient désormais en division 2. « Ce sont deux bons programmes, mais nous avons établi que c’était ce qu’il y avait de mieux pour la ligue », a déclaré Stéphane Auger, directeur du département Hockey au RSEQ.

À noter par ailleurs qu’un comité se penchera prochainement sur ces critères d’évaluation et plus particulièrement leur pondération. L’objectif serait de réduire l’importance des victoires pour en donner davantage à l’encadrement.

Pour Marco Perreault, gestionnaire administratif des Lynx d’Édouard-Montpetit, la présentation qui a été faite au comité était bonne. « On avait l’impression qu’on était dans le coup pour rester en D1. Mais on nous a finalement répondu qu’à court terme, notre programme était celui qui avait le moins de chance d’avoir du succès. Notamment à cause de notre bassin de joueuses. »

Le couperet est tombé tout juste avant le départ de l’équipe pour le tournoi de Stoney Creek. Et question de permettre à tout le monde de bien vivre l’expérience, la direction du cégep a attendu après pour en faire l’annonce. Et sans surprise, la nouvelle a été reçue avec beaucoup de déception par les entraîneurs et les athlètes.

Mais qu’est-ce que ça signifie maintenant pour ce programme de hockey de la rive-sud de Montréal?

« C’est difficile, mais l’engagement est encore là. Notre but est de revenir en D1 dans quelques années », dévoile Marco Perreault. « Le hockey féminin est un sport d’excellence pour nous, à Édouard-Montpetit. On va maintenir notre soutien pour assurer le développement de nos joueuses en travaillant, par exemple, à ajouter des matchs hors-concours et des showcases. »

L’entraîneur-chef Guillaume Archambault a quant à lui espoir de conserver la vaste majorité de ses joueuses. « Il y en a plusieurs qui ont manifesté leur envie de partir à la suite de l’annonce, c’est normal. Mais on va laisser la poussière retomber avant de les rencontrer une par une pour connaître leurs intentions. De notre côté, ce sera à nous de leur montrer qu’on leur offre le bon environnement pour elles.»

Guillaume Archambault, entraîneur-chef des Lynx / Crédit photo : Nicolas Gariépy

Les joueuses des Lynx pourront être sollicitées par les autres formations de la division 1 à partir du 11 novembre, date où le recrutement des joueuses d’âge scolaire ouvrira. Cependant, les règles ont été bien établies. Pour entrer en contact avec une joueuse, les équipes devront passer par Marco Perreault. Ce dernier m’a confirmé qu’aucun bâton ne sera mis dans les roues des athlètes qui auraient une opportunité de quitter pour rester dans la D1.

La saison prochaine, on aura donc deux divisions de hockey collégial féminin à six équipes. En effet, en plus de l’arrivée des Lynx qui s’ajouteront aux équipes de Drummondville, Trois-Rivières, Thetford et Rimouski, une nouvelle organisation fera ses débuts, celle du collège Heritage, de Gatineau. À noter que le cégep de Granby souhaitait également joindre les rangs de la D2, mais leur candidature n’a pas été acceptée.

L’avenir à moyen terme sera intéressant à suivre. Oui, les Lynx souhaiteront retourner en D1. Mais au-delà de ça, il faudra voir comment on pourra faire grandir le bassin de joueuses pour nourrir les formations collégiales, qu’elles soient de D1 ou de D2. Guillaume Archambault est d’ailleurs très impliqué auprès de l’Association de hockey féminin du Richelieu. « On souhaite établir une voie naturelle pour les filles du Richelieu vers le programme des Lynx. »

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Il y a aussi la question des coûts. En constatant d’où proviennent les équipes collégiales D2, la règle de trois se fait vite. Plus de distance équivaut à plus de dépenses. Marco Perreault le confirme : « Ça coûtera effectivement plus cher d’opérer en D2 qu’en D1. Et en ajoutant à ça que nous souhaitons ajouter un autre entraîneur à temps plein éventuellement, les dépenses n’iront pas en diminuant. Mais le cégep veut offrir ce niveau d’environnement à ses étudiantes-athlètes en hockey. Il faut offrir cette opportunité aux filles dont le sport numéro un est le hockey. »

Je termine en vous donnant quelques chiffres tirés du rapport annuel 2022-2023 de Hockey Québec sur ce que représente le bassin en hockey féminin.

  • 952 joueuses étaient inscrites au niveau M18. En contrepartie, il y avait 10 178 joueurs du même âge.
  • La LHEQ, qui est la ligue d’excellence reconnue par la fédération, a produit 85 finissantes. 21 sont allées joindre les rangs universitaires américains ou canadiens tandis que 64 ont pris la route du hockey collégial (48 en D1 et 16 en D2).

Le rapport du Comité québécois sur le développement du hockey présenté en mai 2022 faisait du développement du hockey féminin une de ses neuf recommandations.

La mise en place d’une direction en hockey féminin est essentielle au déploiement immédiat des efforts nécessaires sur tous les plans. Une promotion accrue, des possibilités concrètes et un programme national québécois de développement en hockey féminin font partie des principales mesures qui devraient être mises en œuvre.

Bien justement, hier (25 octobre), Hockey Québec annonçait la nomination de Camille Ménard-Lebel au poste de coordonnatrice au développement du hockey féminin.

Vivement qu’on accélère certaines choses si on veut rattraper le retard du Québec par rapport aux autres provinces. Nos joueuses élites nous rendent fiers. Des joueuses québécoises sont maintenant payées pour poursuivre leur carrière dans une ligue professionnelle. Mais pour que ça se poursuive, il faudra s’assurer de créer, d’entretenir et de développer un bassin de joueuses plus important. Ça passe sans contredit par les options offertes dans les cégeps.

P.S. Les Lynx ont remporté en tirs de barrage leur match face aux puissantes Cougars de Champlain-Lennoxville en fin de semaine dernière, après avoir comblé un déficit de 0-3.