Coupe Grey, coupe Uteck, Bols d’Or et compagnie, partout, à tous les niveaux, on a assisté à de beaux moments pour le football québécois en fin de semaine. Des élèves et étudiants athlètes vivant des matchs et des émotions qui les marqueront longtemps jusqu’à d’anciens étudiants-athlètes, aujourd’hui professionnels, qui font vibrer leurs partisans et réveillent leur fierté.

La fin de semaine de célébration a culminé avec la victoire des Alouettes à la coupe Grey et le cri du coeur de Marc-Antoine Dequoy. Une victoire que les Alouettes sont allés puiser au fond d’eux-mêmes en croyant d’abord au groupe qu’ils formaient. Aucun joueur n’a parlé de lui-même et de ses exploits personnels. Tout a toujours été une question d’équipe. Une leçon à retenir.

Une victoire qui a commencé par Danny Maciocia qui a commencé à bâtir une équipe alors qu’elle n’avait pas encore de propriétaire, ni de moyens pour aller magasiner des agents libres. Maciocia a semé les graines de la culture qui s’est installée dans son équipe en ayant la force d’y intégrer un maximum de Québécois. Puis en allant chercher un entraîneur qui s’est fait un devoir de transmettre l’importance de se rassembler autour de cette culture unique.

Marc-Antoine Dequoy, Kristian Matte, Philippe Gagnon, David Côté, Régis Cibasu, David Dallaire, Louis-Philippe Bourassa, Frédéric Chagnon, Vincent Desjardins, Alexandre Gagné, Tysen-Otis Copeland et Pier-Olivier Lestage sont non seulement Québécois, ils sont des produits de nos universités. Et à cela, il faut ajouter tous les autres joueurs qui proviennent des universités canadiennes dont bien sûr Tyson Philpot, mais également Jeshrun Antwi, Landon Rice et Sean Jamieson notamment.

Un grand match, une grande victoire et de quoi croire avec encore plus de conviction à la qualité des joueurs et des entraîneurs d’ici.

La grandeur des Carabins

L’autre preuve de l’excellence du football québécois est la victoire sans équivoque des Carabins de l’Université de Montréal 29-3 face aux Mustangs de l’Université Western à la coupe Uteck. Bien que ce trophée ne représente rien en soi, il n’en est pas moins une reconnaissance que les représentants du RSEQ seront du match final sur le terrain de l’Université Queen’s la semaine prochaine.

Durant toute la saison, USports, via son système Elo et le vote des médias (je suis d’ailleurs curieux de savoir quels médias québécois ont droit de vote), ont placé Western en tête du classement canadien. Pourtant, la coupe Vanier venait d’être gagnée par le représentant du RSEQ. Et bien que ce classement n’ait aucune réelle importance, il démontre en partie le manque de crédit qu’on donne à certaines équipes ou simplement le fait qu’on ne regarde pas suffisamment les matchs.

Bref, nonobstant cela, les Carabins ont démontré la grande qualité de leur équipe à l’ensemble du football canadien. Et particulièrement l’énorme valeur de leur défensive. Le groupe dirigé par Denis Touchette n’a accordé aucun touché en trois matchs éliminatoires cette saison.

Le demi de coin Louis-Philippe Gauthier a complété le match avec 5,5 plaqués et une interception /
Crédit : James Hajjar

Les deux premières séquences du match se sont soldées par des interceptions. Celle de Nicholas Roy était une démonstration d’à quel point le travail du quart de Western, Evan Hillock, allait être compliqué. Puis, après avoir été intercepté lui-même, Sénécal a construit une poussée comme lui seul peut le faire. Avec l’aide de sa ligne offensive, de Jones, Dembélé et Legault, il a montré à tout le Canada pourquoi les Québécois le présentent comme un joueur spécial.

Et l’excellence des Carabins a continué tout au long de la première demie. La protection qu’avait Sénécal quand il a décoché sa passe à Simon Riopel, malheureusement échappée, était phénoménale. Et le travail de Bruno Lagacé sur l’interception qui a immédiatement suivi était un savant mélange de stratégie, de flair et d’exécution. Puis la passe de côté que Sénécal a servie à Carl Chabot. N’eût été de la couverture de la tertiaire des Mustangs, Sénécal et ses coéquipiers auraient fait encore plus de dommage.

À leurs quatre dernières possessions en première demie, les Mustangs ont cumulé deux verges. Et je ne compte pas la dernière où on a mis un genou au sol avant de se retirer pour la mi-temps. Avant ça, on avait donné quelques bons jeux, mais quand est venu le temps de fermer la porte aux endroits clés sur le terrain, les Carabins ont réussi les grands jeux. Des interceptions, des échappés forcés, chaque fois récupérés par la défensive.

La deuxième demie ne passera pas à l’histoire, mais les Carabins n’avaient pas à prouver qu’ils devaient faire plus, simplement retenir l’offensive adverse et ça a été réussi. Il faudra cependant mieux exécuter en attaque la fin de semaine prochaine. On ne créera probablement pas six revirements en une demie.

Il reste du travail à accomplir pour aller gagner le gros trophée, celui qui symbolise la vraie grandeur au football universitaire canadien. Et contrairement à ce que plusieurs observateurs avancent, ce ne sera pas de tout repos pour y arriver. Sous-estimer un adversaire est la pire erreur à faire et les Thunderbirds de UBC ne sont pas des pieds de céleri. Ceci dit, je n’ai aucun doute que les Carabins et leurs entraîneurs sauront être dans le bon état d’esprit pour finir le travail.

L’excellence à Trois-Rivières

Les stades des Tiger-Cats et des Carabins n’ont pas été les seuls où le charme des équipes québécoises a opéré. Celui des Diablos de Trois-Rivières accueillait les trois matchs du Bol d’Or collégiaux ainsi que celui du juvénile D1. Et chacun de ces duels a offert du jeu superbe aux milliers d’amateurs qui s’étaient déplacés.

Vendredi soir, les Titans de Limoilou ont vaincu les Phénix d’André-Grasset pour devenir la première organisation depuis les Cheetahs de Vanier en 2007 à défendre son titre en division 1. Une bataille épique entre deux équipes athlétiques misant sur plusieurs joueurs qui auront certainement de belles carrières universitaires. La première demie qui s’est terminée 17-16 en faveur de Limoilou a été extraordinaire pour le spectacle. Le jeu au sol de Limoilou trouvait son égal dans l’attaque aérienne de Grasset.

Au final, ça aura été la capacité des hommes de Dave Parent à profiter des revirements. Le tout a commencé quand on a stoppé Grasset sur un 4e essai à son 44. Jérémy Ouellette a ensuite découpé la défensive montréalaise avant de rejoindre Alexis Bourque sur cinq verges. Puis, sur le botté de reprise, ce sont les Titans qui ont recouvré le ballon avant d’aller ajouter un placement.

Les Titans venaient alors de se donner le momentum nécessaire pour achever le travail. La défensive a répondu en forçant un dégagement après trois jeux. Et Jérémy Ouellette, en compagnie d’Olivier Côté, Joey Marcotte et sa ligne offensive ont couru six fois de suite pour franchir les 47 verges qui les séparaient de la zone des buts. C’était 17 points de suite et alors 34-16 avec un peu plus de 10 minutes à jouer.

Crédit photo : Marc-Antoine Hallé

L’attaque menée par Pepe Gonzalez n’a pas abandonné en allant chercher deux touchés, ceux de Charles Williams et Nicolas Lavigne, mais ce fut trop peu, trop tard. Et quand en plus, on accorde un touché sur un retour de botté d’envoi, il n’y avait rien à faire. Match magnifique.

Au sortir de ce match, les noms de Marcotte et de Gonzalez résonnaient fort dans les estrades.

Le samedi, la finale de division 2 mettait aux prises la grosse attaque au sol des Faucons de Lévis et l’équipe la plus complète de la ligue, celle des Lauréats de St-Hyacinthe. La différence s’est faite au deuxième quart quand le porteur de ballon Xavier Roy a fait étalage de sa magie en inscrivant deux touchés au sol de 51 et 60 verges à 2:24 d’intervalle pour faire passer le match de 7-4 à 21-4.

Les Faucons ont retraité au vestiaire à la mi-temps en déficit de 14 points. Ils sont revenus en répondant coup pour coup avec les Lauréats, mais sans jamais être en mesure de solutionner l’énigme de leur jeu au sol. On a donc été incapable de rétrécir suffisamment l’écart pour se donner une chance de gagner.

Au final, Xavier Roy a inscrit quatres majeurs en portant le ballon 21 fois pour des gains de 262 verges en plus de capter deux passes pour 73 verges et retourner trois bottés pour 29 verges. Un total faramineux de 364 verges. Celui pour qui ce match était le chant du cygne a tenu à mettre le crédit de son titre de joueur du match à ceux qui lui ont ouvert le chemin, ses joueurs de ligne et les receveurs.

Sa performance laisse dans l’ombre celle de son vis-à-vis, le porteur de ballon étoile Charles Bourgault qui a cumulé 185 verges en 30 courses. Le quart de Lévis Thomas Cloutier a été excellent encore une fois pour gérer le match complétant 18 de ses 28 passes pour 320 verges.

Malgré que le match ait été joué sous le signe de l’offensive, il faut souligner le travail de Nathan Pronovost qui a non seulement terminé le match avec 8,5 plaqués pour St-Hyacinthe, mais aussi joué son rôle de botteur de dégagement avec brio.

Puis, en soirée, pour le match de D3, si l’issue du match n’a surpris personne, son déroulement a fait vivre de belles émotions aux spectateurs. Les Gaillards de Jonquière étaient très largement favoris, eux qui en étaient à une septième présence consécutive en finale de la D3. Mais les Vulkins de Victoriaville n’étaient pas là pour faire acte de présence.

C’est d’abord la défensive de Victo qui s’est levée en forçant Jonquière à se contenter d’un placement après trois tentatives infructueuses à la porte des buts. Puis on a répliqué avec une poussée de 79 verges qui s’est conclue avec une passe de 15 verges d’Alexandre Gouin à Tim St-Pierre. Ensuite la défensive a encore une fois réussi un gros jeu en forçant et recouvrant un échappé. Gouin a récompensé leur travail quand il a mené les siens à un autre majeur, cette fois une passe de 14 verges à Jérémy Crête. L’avance de 11 points a tenu jusqu’à la fin de la demie alors que les deux équipes se sont retirées avec un pointage de 17-6.

Les Vulkins ont ajouté un point à leur priorité sur un rouge après un dégagement de 56 verges de Jacob Lambert. Jonquière a répondu avec une poussée de 88 verges, mais on a été incapable de marquer après y être allé le tout pour le tout sur un 4e essai à la ligne de 2. Cependant, Victoriaville a concédé un touché de sûreté immédiatement après. Les Gaillards ont ensuite repris à leur 35. Le quart Olivier Lefebvre et son porteur Alexis Bonnefoy ont mené la charge avant que Lefebvre ne complète une passe de 19 verges à Pierre Chollet pour réduire l’écart à 18:15 au tout début du 4e quart.

Jonquière a ensuite pris les devants pour la première fois du match quand Matheo Sankara a retourné un botté de dégagement sur 86 verges pour le touché. Puis la défensive saguenéenne a contenu Victoriaville avant de voir l’attaque frapper un grand coup avec un autre touché, cette fois de William Fortin, meilleur receveur de la D3 cette saison, sur une passe de 20 verges de Lefebvre.

Les Vulkins ont tout donné pour aller se replacer dans le match, mais la défensive de Jonquière n’a pas flanché quand Alexandre Gouin a tenté trois passes consécutives à partir de sa ligne de 8, sans succès. Les Gaillards n’ont eu qu’à écouler les secondes restantes pour s’assurer de la victoire, non sans avoir eu à gérer une adversité qu’ils n’avaient pas connue de toute la saison.

Enfin, dimanche, sous les flocons, la grande finale juvenile D1 a permis de voir à l’oeuvre d’excellents athlètes dans la victoire des Condors de Saint-Jean-Eudes sur les Voltigeurs de Bourget. Amorçant le match sans les services de leur quart-arrière régulier, les Voltigeurs ont confié le rôle à leur meilleur athlète en attaque, le receveur de 6’3 et 245 livres, Maxime Latendresse. Le jeune homme a fait montre de sa supériorité physique, notamment sur les jeux de course, mais ce ne fut pas suffisant.

Son vis-à-vis était Elliott Drapeau, un jeune phénomène qui a complètement dominé l’automne 2023 notamment en complétant 28 passes de touché, contre une seule interception. Le passeur de 6’4 a complété 12 de ses 19 passes dans le match pour 174 passes. Il a pu miser sur l’aide de ses porteurs de ballon Yann-Daniel Drogui et Victor Bégin qui ont amassé ensemble 140 verges sur 26 courses pour trois touchés.

En défensive, Renaud Pichette avec ses 8,5 plaqués et un échappé recouvré a été le meilleur du côté des Condors. Son coéquipier Alexandre Samson en a ajouté 7,5 en plus de forcer et recouvrer un échappé. Chez les Voltigeurs, Yohann St-Martin a été, sans surprise, le joueur le plus dominant en défensive avec 10,5 plaqués, dont huit en solo.

Ces finales sont l’aboutissement d’innombrables heures de travail, d’efforts physiques et mentaux, de préparation, d’étude, de résilience, de patience. Ce n’est pas le trophée qui est célébré, mais tout ce que ça a pris pour y arriver.

Si les émotions divergent d’une personne à l’autre selon les résultats, je ne peux que parler pour moi et vous partager le bonheur immense que vous avez donné à l’amateur de sport que je suis. Suivre vos exploits, essayer de comprendre ce qui fait la différence entre une équipe et son adversaire, puis en parler pour partager mon plaisir ce ne serait pas possible sans votre passion.

À l’année prochaine pour la vaste majorité d’entre vous. Maintenant, rangeons-nous derrière les Carabins pour le dernier grand événement de football de ce côté-ci de la frontière en 2023.

Et je termine tout ça en mentionnant ce que le RSEQ a annoncé lors de ses points de presse récents. Les inscriptions au football étudiant ont augmenté de 10% cette saison. Bref, ce sport est en santé. Ne reste qu’à ajouter deux équipes de plus à notre ligue universitaire…